Le 2 février 1990, le nouveau président d'Afrique du Sud, F. W. de Klerk, fait son discours de politique générale devant le parlement sud-africain. Le genre de discours soporifique que tout le monde écoute distraitement en se demandant combien de temps il reste jusqu'aux petits fours...

Sauf que cette année là, le discours se conclut par un morceau stupéfiant :

  • la fin de l'interdiction des partis politiques (ANC, PAC, SACP),
  • la libération des prisonniers politiques,
  • la fin de l'état d'urgence,
  • la liberté de la presse,

et se termine par ce gros morceau, proprement stupéfiant pour l'époque :

I wish to put it plainly that the Government has taken a firm decision to release Mr Mandela unconditionally. I am serious about bringing this matter to finality without delay. The Government will take a decision soon on the date of his release.

Peu de gens peuvent mesurer, aujourd'hui, l'énorme risque politique pris par F. W. de Klerk. Quels que soient ses défauts (et quelqu'un qui a été ministre de l'intérieur sous le régime d'Apartheid n'est forcément pas complètement propre), il prenait là un gros risque, en allant à l'encontre des souhaits de tous ses électeurs, pour le bien de son pays. La fin du communisme en Europe de l'Est lui donnait une opportunité politique, lui permettant de déminer une partie des inquiétudes de ses électeurs, et donc de ne pas passer pour un dangereux idéaliste.

En pratique, la négociation entre le gouvernement et l'ANC avait lieu, en cachette, depuis plusieurs années déjà (Tomorrow Is Another Country: The Inside Story of South Africa's Road to Change, Allister Sparks).